Samedi 28 septembre, Maud a fait profession définitive à La Xavière. La célébration a eu lieu à Grambois, près de la Pourraque, en présence d’une centaine de personnes : xavières, famille, amis. La célébration fut particulièrement joyeuse !
Témoignage de Maud lors de la célébration
Depuis plusieurs semaines, je me sens comme portée par une grande vague de joie. Une joie profonde, paisible, qui vient de plus loin que moi. Joie de m’engager pour toujours à La Xavière. Joie de m’y enraciner. Joie d’avoir trouver « mon lieu », pour la vie.
J’ai le sentiment que depuis mon adolescence, je suis en quête de ce « lieu » où me donner, où donner ma vie. Je pensais d’abord que ce serait au sein d’un couple et d’une famille. Ce « lieu » aurait donc été une personne, et un foyer avec des enfants. Oui, pendant des années, je pensais que le sens de ma vie était là : me marier et fonder une famille.
Et puis… j’ai rencontré Dieu !
C’était en août 2010, sur un voilier, au large des côtes bretonnes, lors d’un camp Vie en Mer – sorte de retraite-croisière pour des jeunes. J’y ai fait l’expérience que prier c’est non seulement parler à Dieu, mais aussi l’écouter. Alors, j’ai appris à l’écouter. A nouer un dialogue. Et j’ai entendu tout son amour pour moi. Pour chacun et chacune d’entre nous. Merveille ! Être aimée, comme je suis, pour tout ce que je suis, jusqu’au plus creux, jusqu’au plus obscur de mon être.
Peu à peu le désir naissait en moi de lui répondre par le même amour. Que ma vie soit donnée ! Elle ne m’appartient pas. Je l’ai reçue. La mettre au service de ce monde, des hommes, des femmes, des enfants, des jeunes d’aujourd’hui.
Quand la question de la vie religieuse est apparue, j’ai mis un certain temps à vraiment l’écouter, la prendre en compte, et la considérer comme un possible pour moi. C’était tellement loin de tout ce que j’avais imaginé et désiré jusqu’alors ! J’avais peur ! Peur que cette vie me rétrécisse, me ratatine comme un petit raison sec desséché… c’est dire !
Et pourtant… au fond de mon cœur, au plus intime, un attrait. Comme une promesse que cette vie religieuse pouvait être pour moi une vie pleine et déployée.
J’ai choisi de me mettre à l’écoute de cette promesse étonnante.
Accompagnée par d’autres – dont certains, certaines sont présents ici – je suis descendue petit à petit, un pas après l’autre, dans les profondeurs de ce qui habite mon cœur. A l’écoute de l’appel de Dieu pour moi.
Chemin faisant, j’ai appris à mieux connaître le Christ, à mieux me connaître aussi.
J’ai grandi en liberté. Tellement.
La vie communautaire m’y a aidée ! Le dialogue de l’obéissance aussi.
Ce n’était pas toujours facile. Il y a eu des moments où ma petite embarcation, chahutée par les vents contraires, semblait sombrer sous les vagues trop hautes, emportée par les courants trop forts. Comment tenir la barre dans de telles conditions ? Quel cap poursuivre ?
Au creux de la tempête, je me suis demandée si j’étais vraiment faite pour la vie religieuse. Un ami bénédictin m’a alors dit : « Ne te demande pas trop si tu es faite pour ceci ou cela. Tu es faites pour tellement de choses… Demande-toi seulement si le Christ t’appelle. »
Et en effet, dans ces périodes de troubles, je revenais toujours sous le regard aimant, humble et doux, du Christ.
Et ce regard me remettait les deux pieds bien ancrés dans le réel. Car c’est souvent l’imaginaire qui me faisait sombrer dans le doute, la peur de finir comme un petit raisin sec tout desséché.
Mais quand je regardais le réel, je constatais, émerveillée, que mes années de vie religieuse à La Xavière me rendaient heureuse ! Épanouie. Plus humaine. Plus libre, oui. Plus moi. Plus aimante aussi je crois.
Aujourd’hui je peux le dire. Je suis heureuse, profondément heureuse d’être xavière et de m’y engager pour toujours. Sans l’idéaliser, j’aime notre congrégation, et je désire y prendre ma part, pour construire, avec les autres xavières, l’avenir de ce corps au service du Christ, de l’Église, du monde, de nos contemporains.
Je finirai ce petit mot en adressant un merci à ma famille. Tout particulièrement à mes parents, mes frères, ma sœur. Ma famille est le « lieu » où j’ai reçu cet amour inconditionnel, où j’ai découvert que j’étais aimée pour ce que je suis, et quoi que je fasse. Ma famille est le « lieu » où j’ai appris à connaître Dieu, Jésus, la foi chrétienne. Ma famille est le « lieu » où j’ai été éduquée à la liberté. Pour cela, et pour tant d’autres choses, reconnaissance infinie.
Et je conclurai avec les mots de Claire Monestès, notre fondatrice : «Confiance, l’hiver est passé, la tourterelle chante déjà, la moisson va venir, allons la cueillir d’un grand cœur reconnaissant et fidèle ! »
Homélie de François-Xavier Dumortier, sj
Les textes choisis pour la messe étaient tirés du Cantique des Cantiques (chapitre 2), du psaume 130, et de l’évangile de saint Jean (chapitre 21).
Seul celui qui aime peut dire: « m’aimes-tu? ». Seul celui qui aime humblement peut mendier de l’autre la confession d’une réciprocité. Seul celui qui parle à partir du plus intime de son être peut oser une question qui le met à la merci de la réponse d’autrui. Quelle stupéfiante révélation dans ce dialogue tellement simple qu’il semble évident ! Ce n’est pas Pierre qui dit au Seigneur: « m’aimes-tu malgré mon reniement et mon abandon?» : c’est le Christ qui se tourne vers Pierre comme pour lui dire: « j’ai besoin de ton cœur, d’un cœur qui aime », « j’ai besoin que tu me dises ces mots qui viennent de toi mais aussi d’au-delà de toi car l’amour vient de Dieu », parce que Dieu est amour, parce que Dieu n’est qu’amour.
Oui le Ressuscité se tourne vers Pierre comme pour lui dire: «Pierre, j’ai besoin de ton amour». C’est ce que tu as compris, Maud, la tiédeur n’est pas de mise quand il s’agit d’aimer ; et tu te rappelles les paroles de Claire Monestès dans son Journal Spirituel (4 octobre 1930): « amour pour amour, vie pour vie…quand le cœur est pris, il se donne. Quand l’amour est fort, il court , il vole…».
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