Le CEDIRAA, centre diocésain de la recherche action en alcoologie, est situé à N’Ddjamena au Tchad. Il vient de fêter ses vingt-cinq ans. Aurélie, directrice du centre, nous rappelle l’histoire de ce lieu et présente la manière dont les festivités se sont déroulées.
Le CEDIRAA : un centre unique pour lutter contre le fléau de l’alcool.
En 1999, devant l’ampleur des problèmes liés à l’alcool au sein de la population tchadienne, sous l’impulsion de Monique Lorrain, xavière, un petit groupe s’est retrouvé pour voir comment faire face à cette réalité. C’est ainsi qu’a démarré la Recherche-Action en Alcoologie (RAA) à N’Djamena, la capitale du Tchad. De RAA le centre est devenu en 2003 CEDIRAA, « centre diocésain de recherche action en alcoologie ».
1999-2024, au fil de ces 25 ans d’existence, le petit groupe de pionniers a laissé place à une « famille du CEDIRAA » qui ne cesse de s’agrandir, avec chaque année l’engagement de centaines de bénévoles, principalement des jeunes. En ces 25 ans, le CEDIRAA, diocésain par son nom, a élargi son action à l’ensemble du pays, car les besoins sont grands. Nous demeurons en effet l’unique centre d’addictologie du Tchad, un pays grand comme presque 2 fois ½ la France.
Joie et fête pour ces 25 ans
Dès le début de l’année 2024, le jubilé d’argent du CEDIRAA se préparait dans les papiers et les esprits. Voulions-nous le fêter ? Et si oui, comment ? Cette question posée en sein de l’équipe des salariés s’est ouverte aux autres membres de la « famille du CEDIRAA », bénéficiaires, bénévoles et amis. Une réponse spontanée et récurrente fut : nous voulons vivre ce temps avec la fondatrice, Monique Lorrain ! Il s’agissait alors de lui demander son accord, qui fut un oui plein d’enthousiasme.
Le désir exprimé ensuite était de mettre en avant la joie de la vie hors des drogues, à travers des activités didactiques, culturelles et sportives. Des centaines de jeunes bénévoles se sont mobilisés pour ces festivités, et la joie, une grande joie fut au rendez-vous.
Le premier grand rendez-vous fut un fitness matinal de rue. Les plus sportifs étaient en tenue de sport, tandis que d’autres allaient à la rencontre des passants, pour un bonjour, une discussion, un temps convivial partagé. La participation de la sœur Monique, avec ses plus de 70 ans fut remarquée. La présence d’anciens alcooliques, désormais libres sans alcool, passait inaperçue de l’extérieur, mais quel bonheur pour nous de les voir ainsi debout, bien dans leurs corps et avec les autres ! La caravane qui a suivi a aussi laissé des traces, par les paroles de jeunes à d’autres jeunes, en français, arabe et autres langues locales, pour encourager, stimuler, le tout dans une ambiance de fête. Nombreux parmi nous avons reçu ensuite des appels d’amis ou de connaissances nous ayant vu en direct ou sur les réseaux sociaux.
La semaine de festivités s’est poursuivie avec des séances de cinéma, des émissions radios, des conférences, une grande soirée culturelle…
Nous avons aussi été solidaires de la journée internationale de la salubrité : venant des divers quartiers de la capitale, souvent de loin, des jeunes se sont retrouvés tôt le vendredi 20 septembre pour nettoyer la place de la Nation, place centrale de N’Djamena, jonchée de sachets d’alcool frelaté. Un petit geste, pour mettre en valeur la dimension de l’écologie intégrale, quand le souci de la souffrance des personnes malades de l’alcoolisme vient rejoindre le souci de la terre.
Le lendemain, c’est autour d’une eucharistie suivie d’un « verre d’eau » comme on dit ici (repas majestueusement orchestré par une collègue aidée de dizaines de bénévoles qui ont passé une partie de la nuit précédente entre cuisine, discussions et repos), que nous nous sommes retrouvés. L’eucharistie fut un moment fort, vrai temps d’action de grâces, marquée par des prises de paroles fortes, nous remettant dans le service des plus petits, et la grâce de cet envoi. La prise de parole d’Eli, bénéficiaire, a particulièrement touché les cœurs. Quand les mots se font rencontres humaines, quand la lutte pour la sortie des drogues prend visages.
Je rends grâce pour l’intuition de Monique, l’engagement de Thérèse et de Minto ensuite à la direction, pour les salariés et les bénévoles, qui ont permis que le CEDIRAA croisse, au cœur du peuple tchadien, à son service. Quelle grâce que l’envoi en ce lieu de mission, avec mes collègues tchadiens, portés par des soutiens et des prières qui dépassent nos frontières ! Je terminerai en reprenant le verset 6 du 3ème chapitre de la lettre de Saint Paul apôtre aux Corinthiens, que Monique a cité lors de la messe du jubilé : « Moi, j’ai planté, Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui donne la croissance. » Merci Monique d’avoir semé, merci à tous ceux et celles qui ont arrosé. Merci Dieu de faire de nous tes collaborateurs, de nous envoyer les uns vers les autres, les uns avec les autres, les uns pour les autres.
Action de grâces de Monique Lorrain
Quel cadeau inattendu d’être invitée au Tchad pour la célébration du Jubilé du CEDIRAA,dont j’avais posé les premières pierres il y a 25 ans !
Depuis, plusieurs xavières se sont succédées pour poursuivre et développer le CEDIRAA : Thérèse Verger qui a initié les cures de désintoxication, et Aurélie Roiné actuellement, qui déploie les actions dans différentes régions du Tchad.
Quelle joie de voir combien la petite graine semée il y a 25 ans a grandi !
Comment ne pas en avoir le cœur plein de gratitude ?
Et quelle joie aussi de revoir beaucoup d’amis après 17 ans d’absence : si nos corps portent la marque du temps passé, les liens tissés eux n’ont pas été érodés par le temps, et chacune de ces rencontres avait la couleur d’une Visitation.
Je garde dans le cœur une grande reconnaissance au Seigneur pour ce cadeau tout gratuit qui m’a été offert !