« Jouer cœur et gagner » : une expression de Claire Monestès qui dit quelque chose de sa sensibilité ardente et de l’amour qui irriguait son cœur.

A l’occasion de sa fête le 14 février, Géraldine Lasserre, xavière en communauté à la Pourraque, nous fait découvrir dans le journal spirituel de Claire quelques traces de ce mystère d’Amour auquel notre fondatrice a livré sa vie.

Quand on lit le journal de Claire – qui va de 1907 à 1933 – avec la porte d’entrée du cœur, on découvre, sur le plan de la vie spirituelle, une lumière tenace dans la nuit et sur le plan de la vie ordinaire, un goût tout aussi persistant pour la délicatesse, l’attention aux cœurs, aux âmes…

A la fin de son journal, dans la relecture d’un temps de retraite, elle évoque la figure de Thérèse de Lisieux : « Vous m’aimez tant ! Et moi ? On dit que sainte Thérèse a joué cœur et qu’elle a gagné. Et moi ? » L’expression a dû lui plaire. Claire aimait les bons mots.

Une grande sensibilité transparaît au fil des pages de son journal.

La délicatesse dans les relations

« Le tact dans la conversation, c’est le papier fou dont on enveloppe les objets mis en contact pour les empêcher de se heurter. » (1907)

Le sens des choses et de leur valeur

« Depuis trois ans, j’ai fait pour la seconde fois une heure de musique. Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous donné un don qui, je crois, dépasse la moyenne et le laisser stérile ? (…) Il m’a toujours été désagréable de voir des fleurs cueillies et oubliées dans un coin sans profit pour personne. J’ai l’impression d’une vie brisée et d’une injustice. » (19 décembre 1918)

Elle consent à souffrir, à être blessée, et que la blessure mette du temps à cicatriser :

« Chose étrange que, si profondément convaincue qu’il n’y a plus rien à espérer, j’attende toujours de cette maison si close pour moi, un je ne sais quoi qui jaillirait du cœur, qui serait un baume, même si aucune modification dans ma vie ne survenait. » (5 février 1919)

Elle rêve une manière d’aimer grande et large :

  • à la lumière de sa méditation du cœur de Marie :

« Tout ce qui est grand, profond, fort et durable, cache à sa base une humilité douce et sereine, confiante dans une supériorité reconnue et qui s’attache, non à la faire disparaître, mais à élever l’âme au degré où elle voit l’être aimé. Cette admiration sans flatterie, sans bassesse, souvent est mutuelle, image faible et imparfaite de cette amoureuse complaisance qui unit entre elles les trois Personnes divines. » (1er mai 1919)

  • et à la lumière du cœur de Jésus :

« C’est la même sève, et s’il plaît au Seigneur, elle fera germer une plante de la même famille, avec d’autres caractères, reconnaissable surtout par son cœur. Un cœur généreux, fort, loyal, compatissant, miséricordieux, un cœur qui a été modelé sur [le] Cœur de Jésus. » (26 novembre 1921)

Elle noue ensemble le cœur et l’intelligence :

« Les dogmes, oui, pour bien voir la lumière, mais la communion pour mieux croire. La lumière qui ne passe pas par le cœur est une lumière froide et impropre à la vie. » (10 avril 1921)

La victoire de l’amour en Claire

Claire a beaucoup lutté. Elle avait un ardent amour du Christ, mais elle a aussi souvent été douloureuse intérieurement et physiquement. Elle a eu de grands amis sur son chemin spirituel qui l’ont beaucoup accompagnée, soutenue, encouragée. Et sur la fin de sa vie, quelque chose d’une libération, une joie : la victoire de l’amour, la victoire de Dieu en elle. Elle en parle en parlant de ses retraites.

 « Cette retraite a été pour moi mon chemin de Damas, et le Seigneur a bien voulu me donner la joie de me rendre enfin, à cœur perdu, à âme perdue, à vie perdue, à la voix du Père qui a tant désiré, tant travaillé, tant souffert pour cette conversion. (…) Il [Notre Seigneur] m’a pris par mon faible, la logique ravit mon esprit, mais n’empoigne pas mon cœur, et je n’ai jamais su donner que de l’amour. » (1929)

Et à sa retraite un an plus tard elle écrira :

« Cette empreinte du Christ sur mon âme, comme elle est forte et puissante si je le veux ! Elle me divinise. Ce n’est plus moi qui vis. Faire un acte de foi à cette vie du Christ en moi. (…) Prendre conscience de plus en plus de cette vie. Écouter en moi battre le cœur de mon Dieu. (Retraite, 1er jour, 1930)

Et au dernier jour de sa retraite de 1932 :

« Contemplation ad amorem. La meilleure de toute ma retraite. Ma vie toute en amour. Celui du Christ pour moi, miraculeuse en plus d’une circonstance. Que je sache dire merci à plein cœur et donner tout, tout moi, l’univers tout entier, par mes désirs de missionnaire. (Retraite, 1932) »

C’est la relecture que Claire peut faire de sa vie, de sa quête inlassable de Celui à qui elle s’est donnée en 1906.

Pour aller plus loin

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