Maud Martinez est religieuse xavière et comédienne. Interviewée par le magazine de spiritualité Panorama de novembre 2021, elle partage ce qui constitue le cœur de sa vie.
Interview reproduite ici avec l’aimable autorisation de Panorama.
Propos recueillis par Marie-Christine Vidal, photos de Frédéric Pasquini.
Vous êtes religieuse xavière et comédienne. À l’occasion des cent ans de votre congrégation, vous jouez 1 001 Xavière(s). Pourquoi ce spectacle ?
Pour évoquer la question de l’engagement. Le spectacle a été écrit après un atelier d’écriture de xavières. On y entend l’épreuve dans leur vie, les doutes, l’incompréhension, la joie, la ferveur… On y voit aussi Claire Monestès (1880-1939), notre fondatrice, dont le chemin n’est pas linéaire. Le but est de toucher le spectateur dans sa quête du sens de la vie.
De quelle famille venez-vous ?
Nous sommes quatre frères et sœurs, et je suis le numéro 2. Nous avons pas mal voyagé quand j’étais enfant, car mon père travaillait pour des entreprises internationales. Ma mère était ingénieure puis elle est devenue artiste sculptrice. Mon enfance, c’était Paris, la région parisienne, New York, Lyon. La foi était présente, de façon assez libre. Parfois, on priait le soir en famille. On allait à la messe, peut-être pas tous les dimanches, mais ça faisait partie de notre vie. Quant à l’existence de Dieu, je ne l’ai jamais remise en question.
Quand le théâtre est-il arrivé dans votre vie ?
faisais surtout beaucoup de danse. Après le bac, j’ai étudié l’économie et la gestion, puis les langues appliquées (anglais et allemand). Ensuite, je suis partie en Allemagne, à Berlin, pour un master en Management de la culture, avec l’idée de travailler dans le spectacle vivant, côté administration. Je me suis offert un stage d’une semaine au cours Florent (école de théâtre à Paris, ndlr), et j’ai beaucoup aimé. Après mon master, j’ai suivi les trois ans du cours Florent. Avec d’autres élèves, nous avons monté La boutique de l’orfèvre, une pièce de Jean-Paul II, un texte génial qui parle d’amour, d’aimer et d’être aimé. Puis j’ai joué un peu de tout, des pièces contemporaines, des spectacles pour le jeune public.
Qu’est-ce qui vous attire dans le théâtre ?
J’arrive à mettre des mots dessus depuis pas très longtemps. Il y a quelque chose de l’ordre d’un cri que je lance au monde. Une manière de dire tout ce qui me traverse et fait ma vie. Ce n’est pas forcément de la révolte. Dans ce qu’on vit, il y a du bon, du beau, du difficile, mais justement : regardons et ne vivons pas à côté de nos vies. Pour moi, la force qui circule par le théâtre est un peu du même ordre que la prière : un art vivant où des êtres humains sur scène parlent à d’autres êtres humains dans la salle, et il se passe quelque chose. Au théâtre, d’ailleurs, on emploie beaucoup de vocabulaire spirituel : communion, moments de grâce… Le cours Florent, c’est l’époque où j’ai commencé à revenir vers l’Église. J’allais de temps en temps à la messe ; je priais comme ça, comme une adolescente, et puis j’ai suivi le parcours Even pour les jeunes, à l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Il m’a renouvelée complètement, m’a montré un nouveau visage de l’Église et de la foi. Au même moment, au cours Florent, j’entendais des choses qui se recoupaient avec la foi.
C’est-à-dire ?
Je me souviens d’un prof, Laurent Natrella, de la Comédie-Française, qui nous parlait d’une réplique de Musset, mettons : « Marianne passe au loin. » Selon lui, il est plus intéressant de dire cette réplique puis de voir Marianne passer que l’inverse, c’est-à-dire voir Marianne passer puis dire qu’elle passe. Il affirmait que la parole est créatrice, qu’elle crée l’acte. Des choses comme ça, c’est trop beau ! Cet « ici et maintenant » du théâtre… Si on n’est pas là, il ne se passe rien. La prière, c’est pareil. Être présent ici et maintenant. Je pense aussi à l’écoute des partenaires sur scène. En atelier théâtre avec des enfants, c’est ce que j’essaye de leur transmettre : être présent ici et maintenant, à l’écoute de mon intériorité, en étant sincère. Ne pas plaquer une émotion mais me demander : « Je dis ça, mais qu’est-ce que ça me fait ? » Ou : « L’autre me dit ça, qu’est-ce que ça me fait ? » Et, ensuite, créer ensemble une histoire. La vie communautaire, c’est un peu pareil : accueillir l’idée de l’autre et chercher comment créer ensemble. Dans le jeu théâtral aussi, je vois un lien avec la prière. Le texte que je reçois a été écrit par un auteur, a été joué avant moi, mais chaque interprétation sera unique. C’est de la rencontre entre le texte et moi que va naître quelque chose de singulier. La prière, c’est cela ! Vous voyez, il y a un vrai parallèle entre le travail du comédien et la vie spirituelle, la manière de vivre de la Parole vivante. À un moment donné, quelque chose d’unique se passe entre un texte et moi. Si quelqu’un d’autre prie avec le même texte au même moment, ce sera autre chose.
Votre vocation religieuse, comment est-elle née ?
Ma rencontre personnelle avec le Christ a eu lieu grâce à un camp de voile « Vie en mer, entrée en prière », proposé par le réseau ignatien (de saint Ignace de Loyola, fondateur des jésuites, ndlr) pour les jeunes, Magis. J’aime énormément le bateau, depuis toute petite. J’étais même monitrice de catamaran à l’école de voile Les Glénans, en Bretagne. À l’été 2010, alors que j’allais finir le cours Florent, je me posais des questions : est-ce que je vais continuer dans le théâtre ou revenir dans l’administration ? Even m’avait permis de réaliser que la foi change quelque chose dans ma vie, alors je me suis dit qu’une retraite serait pas mal. Je me suis donc embarquée pour quinze jours, et ça a été formidable. Jusqu’alors, pour moi, la prière consistait à parler à Dieu dans le silence de mon cœur. Là, j’ai découvert la manière de prier d’Ignace : un dialogue, l’expérience d’une rencontre personnelle. Pas simplement parler, mais aussi écouter Dieu, qui nous parle à travers ses textes et nos méditations. Ce fut le début de la fin… (Rires.)
Et après cette retraite ?
J’ai découvert l’accompagnement personnel et le partage en petits groupes, des manières de faire ignatiennes. J’ai trouvé ça formidable. Je suis alors rentrée vraiment dans la famille ignatienne, accompagnée spirituellement par un jésuite. Et puis, j’ai préparé ma confirmation. Dans ce cadre-là, lors d’un enseignement sur la façon dont l’Esprit Saint nous parle dans notre vie, l’orateur a pris l’exemple de sainte Thérèse d’Avila, qui, jeune, avait le désir de fonder une famille. En écoutant Dieu, elle s’est rendu compte que sa vie était du côté de la vie religieuse et a renoncé au mariage. En entendant cela, des larmes se sont mises à couler de mes yeux. Comme si ces mots m’étaient adressés à moi personnellement. Le sens de ma vie, jusqu’alors, était de fonder une famille, de donner ma vie de cette manière-là. Alors le discernement a commencé, avec mon accompagnateur.
Combien vous a-t-il fallu de temps pour discerner ?
Environ trois ans. Une étape importante a eu lieu en 2011, au moment des Journées mondiales de la jeunesse de Madrid. J’aidais pour l’organisation d’une route maritime vers l’Espagne, avec le groupe « Vie en mer, entrée en prière ». Au bout de trois ou quatre jours en mer, j’ai eu un problème au genou, il a fallu me débarquer. Or cette traversée était importante pour moi. J’avais besoin d’un temps pour me poser et écouter Dieu, car j’avais cette question de la vocation religieuse, alors que j’étais en couple avec un garçon. Finalement m’est revenu le désir de me rendre à Assise, où j’étais déjà allée en 2005. J’avais logé au monastère des clarisses – des Françaises – et j’avais un bon souvenir de leur accueil. Cet été 2011, j’y suis donc retournée pour quelques jours. J’ai été très touchée ; j’ai découvert sainte Claire, la vie monastique. De retour en France, j’ai eu le désir d’y retourner. Finalement, je suis entrée au postulat à Assise.
Cloîtrée ?
Oui, et heureuse. Même si ça a aussi beaucoup combattu en moi. Je renonçais à la fois au mariage, à la vie de famille et à être sur le terrain. Mais il y avait quelque chose qui m’attirait énormément et je l’entendais comme venant de Dieu. C’était un lieu de vie pour moi. La prière, le silence, l’intériorité… J’étais touchée par la relation de sainte Claire avec Dieu, très intime, très féminine. Je suis restée six mois à Assise, et je suis revenue en France. Je ne savais plus rien : la vie religieuse ou pas, la vie monastique ou pas… J’ai suivi un parcours proposé par la famille ignatienne pour les filles qui se posent la question de la vocation religieuse. C’est là que j’ai compris que, définitivement, j’étais ignatienne. J’ai aussi compris que les vœux d’obéissance, de chasteté, de pauvreté me parlaient comme un chemin de vie. Finalement, il y avait donc pour moi quelque chose qui ressemblait à un appel du côté de la vie religieuse… Et puis le témoignage d’une xavière m’a rejointe : la vie communautaire et, surtout, la place donnée à la liturgie des Heures.
Qu’est-ce qui vous touche dans la liturgie des Heures ?
C’est une prière de fidélité : chaque matin et chaque soir, on prie les mêmes psaumes dans le monde entier. Et ces paroles touchent toutes les émotions. Cela rejoint un peu le théâtre. Chez les clarisses, je m’étais d’ailleurs dit que je n’aurais plus le théâtre mais qu’il me resterait les psaumes : l’espérance, la foi, la louange, la désespérance, la colère, l’incompréhension. Les psaumes donnent une voix à chacun, quoi qu’il soit en train de vivre. Il y en a des terribles mais il y a toujours quelqu’un sur terre « ici et maintenant » dont tel psaume est la voix.
La Xavière, c’est ainsi que l’on appelle votre congrégation, a aussi la particularité de vivre dans le monde…
Oui. Cela me plaît. Continuer à avoir un métier. En communauté, c’est très riche. Chez nous, à Nice (Alpes-Maritimes), nous sommes quatre. Geneviève, prof de maths et de sciences à la retraite, s’occupe de la spiritualité ignatienne dans le diocèse. Coralie, astrophysicienne de formation, est prof de maths et Adeline est gériatre.
Vous vous souvenez du moment où vous vous êtes dit : « Je serai xavière » ?
Il y a eu un moment décisif, dans la maison de la congrégation, à La Pourraque, dans le Vaucluse, où toutes les xavières se retrouvent chaque été. C’était tout bête, autour de la table. On discutait et je me suis sentie comme en famille. Je me suis dit que je me verrais bien partager la vie de ces femmes-là, vivre ce style de vie-là.
Parmi les vœux, y en a-t-il un qui vous semble plus compliqué que les autres ?
Ils sont entremêlés… Mais, pour moi, le plus difficile, c’est le célibat, lié au vœu de chasteté. Il crée un manque mais je sens aussi qu’il ouvre un espace en moi, une disponibilité intérieure et affective. À moi de faire que cet espace soit fécond et que la vie en jaillisse.
Qu’avez-vous découvert dans la vie religieuse que vous n’imaginiez pas ?
L’expérience d’être envoyée. J’ai un désir, je pense qu’il est bon et qu’il correspond à ce que le Seigneur m’invite à vivre, mais je suis ouverte à ce que quelqu’un d’autre m’entraîne ailleurs au nom du Seigneur. Fondamentalement, je cherche à vivre la même chose qu’auparavant, mais je me sens envoyée au nom du Christ. Ma congrégation pense que cela a du sens d’être présente là où je vais. Cela me renforce énormément. Oui, le royaume de Dieu peut être annoncé par des cours de théâtre ou en jouant un spectacle ! J’aime que les choses soient bien faites et j’ai toujours un peu tendance à serrer les poings. Être envoyée m’apprend à ouvrir les mains et à accueillir. C’est Dieu qui veut travailler dans ces enfants de l’atelier théâtre, dans ces jeunes, avec le public. Quand je n’obtiens pas ce que j’aurais aimé, je me remets au Seigneur dans la prière : « Ce n’est pas mon projet, c’est ton projet. » Peut-être que le Seigneur n’a pas assez de place pour s’engouffrer… Je dois accepter une sorte d’abandon tout en étant disponible pour faire le travail. Ce qui est premier, c’est le service du Christ.
En quoi le théâtre peut-il faire advenir le royaume de Dieu ?
C’est un outil pédagogique : éduquer, faire grandir en humanité, développer la confiance en soi, travailler le rapport à l’autre. Certains enfants sont extraordinaires sur scène, d’autres ont plus de mal. Plutôt que de monter un spectacle super bien joué, je leur apprends à descendre en eux-mêmes et à nourrir leur intériorité. Pour que chacun sorte quelque chose de ce qui l’habite profondément.
Que leur transmettez-vous du message de l’Évangile ?
Que chacun est unique, un trésor à respecter. Cela apprend à regarder l’autre avec bienveillance, à rire avec la personne mais pas de la personne, à ne pas être dans le jugement. C’est l’Évangile qui se transmet, sans parler de Jésus. Il est là et il travaille dans le cœur de tous, croyants ou non.
Combien de vocations avez-vous ? Religieuse ? Comédienne ?
Je n’en ai qu’une : ma vocation d’enfant de Dieu. Le théâtre fait partie de moi mais si, un jour, La Xavière m’envoie dans un autre milieu professionnel, cela se fera à l’écoute de l’Esprit. La vocation religieuse prime donc. Mais, pour moi, les deux se fondent dans la vocation à « aimer et servir Dieu en toutes choses », comme le dit Ignace. L’homme est créé pour louer, respecter, servir Dieu, pour quelque chose qui le dépasse. C’est ce que je vis dans la vie religieuse et dans le théâtre.
C’est-à-dire ? Dans le théâtre, qu’est-ce qui dépasse l’homme ?
En tant que comédienne, je ne me sers pas moi mais je sers quelque chose de plus grand : un texte, un auteur, une vision du metteur en scène. Dans une représentation théâtrale, une force de vie circule, qui nous échappe. On vit quelque chose ensemble avec des gens qu’on ne connaît pas. Cela nous relie aux autres. Ce résultat dépend de moi, comédienne, mais une fois que c’est parti, ça ne dépend plus de moi. Dans ses Exercices spirituels, saint Ignace s’attache à repérer ce qui permet à la vie de croître.
Chez vous, qu’est-ce ?
L’action de Dieu et de l’Esprit. Comment lâcher, ouvrir, pour que l’Esprit puisse agir ? Parfois, c’est aussi simple que le rire d’un enfant au milieu d’un cours ou un échange avec la chorégraphe avec qui je travaille. On s’écoute, on mélange nos univers pour créer quelque chose ensemble. Ce qui permet aussi à la vie de croître, c’est de rendre grâce pour les bonnes choses. Un repas, une glace, une pêche. Enfin, je dirais aussi quelque chose de l’ordre de la rencontre. Quand on permet à l’autre d’être lui-même et que l’on sent qu’on peut être soi-même.
Y a-t-il un passage de la Bible qui vous touche particulièrement ?
Le combat de Jacob avec l’ange (chapitre 32 de la Genèse, ndlr). Ça a été un texte fondateur et je prie encore régulièrement avec. Il dit quelque chose de ma relation avec Dieu qui est de l’ordre d’une étreinte, d’une danse. Pour m’offrir et lâcher, ne pas être sans cesse en train de reprendre la vie que j’ai donnée le jour de mes vœux. Ce combat est amoureux, pour la vie, avec Dieu. Il est donc bon de se laisser vaincre, toucher, bénir. Peut-être qu’au fond du fond, cette lutte n’est pas tant avec Dieu qu’avec moi-même… Comme si je me démenais toute seule contre moi-même et que Dieu m’invitait à lâcher, à ce que cette lutte se transforme en danse. Dans les évangiles, je suis aussi touchée par le regard aimant de Jésus. C’est en l’accueillant sur nous que la vie peut surgir. J’entends aussi une invitation pour moi dans mon travail : comment offrir aux enfants un regard qui leur permette de grandir en liberté ?
Pour vous, existe-t-il un problème avec la place de la femme dans l’Église ?
Oui. C’est un texte de Joseph Moingt (jésuite mort en 2020, ndlr) qui m’a montré à quel point cela me touchait. Il y explique que, selon lui, l’Église ne sera crédible que si elle donne aux femmes une place égale à celle des hommes. Une part de moi est profondément touchée. Heureusement, il y a des choses qui bougent : des femmes nommées à des hauts postes au Vatican, enseignantes dans des séminaires, membres de conseils épiscopaux. Le problème, c’est la visibilité dans la vie ordinaire. Cela joue dans notre inconscient et n’aide pas à se projeter dans les prises de décision, et pas seulement dans la préparation des fleurs ou la quête. Tellement de femmes agissent dans l’ombre sans qu’on les voie ! Mais l’Église, je l’aime quand même. Je m’y sens chez moi et en famille.
Est-ce que vous arrivez à prendre chaque jour un temps d’oraison personnelle ?
Non. Mais, parfois, l’oraison prend des formes diverses. Un jour, un ami jésuite était venu me rendre visite à Nice. Nous sommes allés à la messe à 8 heures, sans avoir prié avant, puis nous sommes allés nager. Quand on est sortis de l’eau, il a dit : « Ça vaut bien une heure d’oraison, ça, non ? » Cela m’a fait beaucoup de bien. C’est cela, la spiritualité ignatienne : il est important de garder ce lieu de fidélité avec Dieu dans la rencontre dans sa Parole mais, parfois, on le retrouve en allant marcher, ou dans les transports en commun. Qu’est ce qui va m’ouvrir à la présence de Dieu dans ce monde ? Le soir, dans ce que les ignatiens appellent la prière d’alliance – la relecture de journée – je retrouve la trace de Dieu. L’enjeu est ma relation avec le Christ. Retourner à la source pour laquelle je donne ma vie.
Vous aimez beaucoup la mer…
C’est un des lieux où je me sens le mieux. Quand je nage dans la mer, j’ai l’impression d’une communion avec la nature. Contempler l’horizon, être ballottée par les vagues, avalée par l’eau, et remonter à la surface. En bateau, le vent nous pousse ou est contre nous ; c’est un peu l’alliance entre l’homme et la création. On compose avec les éléments, toujours plus forts que nous, et cela nous met dans une position d’humilité. Quand on file sur l’eau, on sent la mer qui nous porte et le vent qui souffle dans les voiles. J’adore ! Pourtant, devant la Méditerranée, je ne peux m’empêcher de penser à ces gens qui meurent en voulant fuir et en espérant trouver des conditions meilleures. Malgré tout, la mer avance et sa force est là. Cela me redonne de l’espérance pour avancer.
Où vous imaginez-vous dans dix ans ?
C’est trop dur de répondre ! J’ai l’impression de faire une réponse gnangnan mais, pourtant, c’est vrai : je serai là où l’Esprit m’emmènera. Ce n’est pas moi qui vais décider, ce n’est pas Dieu qui va me dire ce que je dois faire mais c’est ensemble. Dans dix ans, j’espère avoir grandi intérieurement. Être plus libre. Cela fait six ans que je chemine avec les xavières et, plus j’avance, plus je me rends compte que c’est un lieu qui m’épanouit. Même s’il y a des difficultés, j’ai le désir de poursuivre cette vie-là. Dans dix ans, j’aspire à m’être engagée définitivement. Je pense que quelque chose se joue le jour où l’on dit oui à Dieu pour toujours et où la congrégation s’engage avec nous pour toujours.