Ce weekend de Pâques, quarante jeunes étaient réunis au centre spirituel Manrèse, à Clamart, pour vivre ensemble une halte bienfaisante et ressourçante. Lors de la veillée pascale, Juliette, jeune xavière de Créteil, a commenté l’évangile en montrant comment il peut résonner dans notre monde si sensible aux images.
Fresco of the "white angel" and the myrrhbearers at Christ's Grave, c. 1235 AD. Mileševa monastery in Serbia - photo : Snežana Trifunović

Quel est le rapport entre Astérix et ce texte d’évangile ?

Il n’est peut-être pas flagrant à première vue, et pourtant ! Si vous regardez bien le début, on a une description qui peut faire penser à un dessin animé : l’ange qui apparaît d’un coup, de façon spectaculaire, avec l’apparence de l’éclair et un vêtement blanc comme neige, et qui, l’air de rien, roule la pierre du tombeau de Jésus, et s’assoit dessus. En version dessin animé, l’ange roulerait la pierre avec juste un doigt, comme s’il avait pris de la potion magique, et s’installerait dessus avec une petit air désinvolte. Et puis bien sûr il y a les gardes, qui se mettent à trembler, un peu comme les légions romaines quand les habitants du village gaulois s’approchent un peu trop.

Mon parallèle s’arrête là, mais ce que je trouve frappant, c’est l’importance de la vue dans ce passage :
– Les femmes vont au tombeau pour regarder le sépulcre
– l’ange dit aux femmes « venez voir l’endroit où reposait Jésus »
– et quel est le message qu’il leur dit de porter aux disciples ? « Jésus vous précède en Galilée, là vous le verrez »
– et Jésus redit ensuite « mes frères doivent se rendre en Galilée, c’est là qu’ils me verront. »

Voir Jésus. Il y a une quête autour de ça, un enjeu.

Cela peut nous interroger : est-ce que moi, j’ai le désir de voir Jésus ? Et de façon plus large, qu’est-ce que je désire voir ?

Dans notre monde actuel où n’importe quelle image est à portée de smartphone, il est essentiel de réapprendre le désir de voir. Si vous demandez à Siri « Siri, montre-moi Jésus ressuscité », vous risquez d’être déçus.

Nous ne sommes pas créés pour être des consommateurs d’images, de vidéos Tiktok ou de stories instagram, qui nous sont servies à la louche sans que nous ayons à faire le moindre effort. Nous sommes des êtres de contemplation, d’émerveillement, de louange, des chercheurs de Dieu. Et je nous souhaite à chacun de porter le profond désir de voir Jésus.

Jésus, on peut le contempler dans Sa Parole.

Dans les évangiles qui nous ont été transmis. Oui, Dieu nous parle dans sa Parole, et ce texte nous rappelle trois caractéristiques de la Parole de Dieu :

1. la parole de Dieu, elle est fiable, digne de confiance
Je ne sais pas si vous connaissez cet épisode de Bref : « bref, j’ai un ami à conditions générales ». Le héros a un ami qui fait toujours de belles promesses, mais il finit toujours ses phrases par « enfin… ». « Tu viens dormir chez moi quand tu veux ! Enfin… » Et derrière le « enfin » on voit que les promesses ne sont pas vraiment fiables.
Jésus, lui, a une parole sûre. L’ange dit aux femmes « Jésus le Crucifié est ressuscité comme il l’avait dit. « Resurrexit sicut dixit ». Comme il l’avait dit. Jésus est par excellence celui qui dit que qu’il fait et fait ce qu’il dit, et nous pouvons nous appuyer sur sa parole.

2. La parole de Dieu, elle rend vivants :
Vous vous rappelez des soldats qui étaient tout tremblants ? On dit qu’ils étaient dans la crainte.
Les femmes aussi sont dans la crainte, mais pas seulement. Elles ont entendu la parole de l’ange, et sont remplies aussi d’une grande joie. La crainte ne prend pas toute la place dans leur vie.

3. La Parole de Dieu, elle se partage.
Les femmes portent la Bonne Nouvelle, la Parole, comme Marie après l’Annonciation s’est mise en route en portant en elle Jésus, le Verbe de Dieu, la Parole faite homme.

Il y a quelque chose d’étonnant sur le chemin de ces femmes :

– Elles sont venues voir Jésus au tombeau.
– L’ange leur a dit d’aller voir les disciples pour leur annoncer la résurrection et leur dire d’aller en Galilée.
– Alors elles partent, et voilà qu’elles rencontrent Jésus lui-même qui leur redit d’aller dire aux disciples de le retrouver en Galilée.

Pourquoi cette insistance ? Pourquoi ces deux apparitions ?
Je ne me risquerais pas à des hypothèses, mais je retiens un point d’attention.
Les femmes sont remplies de joie et s’empressent d’obéir à l’ordre qu’elles sont reçu. Vite, vite, vite, elles se mettent en route. Mais quand Jésus vient à leur rencontre et leur parle, elles le reconnaissent. Elles ne lui parlent pas, mais elles ont un geste d’adoration, elles se prosternent.

Et cela peut être un rappel pour nous.

Dans le rythme effréné de nos vies, où tout va à mille à l’heure, où nous avons le souci de bien faire les choses, et même de bien faire les choses pour Dieu (« là je speede parce que j’ai une maraude avec la paroisse », « ouais je cours parce que je là j’ai rendez-vous avec ma fraternité », « bah mon effort de carême c’est la messe en semaine et j’ai trois mn pour faire cinq stations de métro »), nous courons le risque d’une forme de volontarisme : à trop vouloir faire des choses pour Dieu, nous risquons de faire les choses sans lui.

Je vous invite à être attentifs à des paroles précises de la liturgie eucharistique : « Par lui, avec lui et en lui, à toi, Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit, tout honneur et toute gloire pour les siècles des siècles ». « Par lui, avec lui, en lui ». Pas « pour » lui. Nous avons été créés pour Dieu. Mais nos actions sont vaines si elles ne sont pas vécues par Lui, avec Lui, et en Lui.

Dans nos vies de chrétiens, puissions-nous vivre avec le grand désir de voir le Christ, le contempler dans Sa Parole. Puissions-nous le reconnaître, l’adorer, et agir par lui, avec lui, en Lui, le Christ ressuscité, vivant, qui nous veut vivants.