Faire du pain en temps de confinement… Une expérience concrète et profonde que nous partage Coralie.

Avec le début du confinement, la machine à pain de la communauté a repris du service. En ce temps où nous peinons à dessiner demain, faire du pain me convoque dans le concret du présent.

Il y a la farine, avec toutes ses nuances de couleurs et de textures. De la farine blanche à la farine bise, du petit épeautre à la farine de châtaigne, de la farine complète au mélange de céréales. Derrière elle, le grain tombé en terre et tout ce qu’il faut d’eau et de Soleil pour que les épis dorés ondulent au vent au temps de la moisson. Derrière elle aussi tout ce qu’il faut de travail pour semer, moissonner, puis broyer le grain, avant de pouvoir nouer un sac bien tassé. Devant moi, ce sont, au gré des recettes, l’eau ou le lait, l’huile ou le beurre, les graines de sésame, de lin ou de tournesol, le sel, le sucre, sans oublier la levure, chacun des ingrédients avec sa consistance, se fondant en une pâte lisse et douce. Il y a la joie de créer, d’expérimenter, de jouer même, dans la diversité des recettes et des possibles.

Vient alors le temps de la patience. Celui où, ma part accomplie, il s’agit de laisser le silencieux travail de la levure se faire. Car c’est bien elle, qui enfouie dans trois mesures de farine, va faire lever toute la pâte. Temps pour apprendre que je ne maîtrise pas tout, invitation à accueillir ce qui advient au plus secret. Monte alors de la cave où le pain cuit, d’abord imperceptible, puis de plus en plus intense, une bonne odeur qui se répand dans la maison.

L’attente est récompensée bientôt par la surprise et l’émerveillement : les ingrédients épars du début ont donné corps à cette mie moelleuse, à cette croûte qui craque. Occasion de réentendre ce vieux texte de la tradition chrétienne : « Comme ce pain rompu, autrefois disséminé sur les collines, a été recueilli pour n’en faire plus qu’un, rassemble ainsi ton Église des extrémités de la terre dans ton Royaume. »
Et ce pain tout juste démoulé et encore chaud, le voilà offert pour restaurer celles qui le mangeront.

Pain du Jeudi saint - Nice 2020