Quelques jours avant de partir du Tchad – où elle a passé 14 ans au service des jeunes, Brigitte Lécuelle a reçu la médaille de l’ordre national du mérite des mains de l’ambassadeur de France.
Dans le mot qu’elle a adressé ce jour-là à l’assemblée présente, elle évoque toutes les personnes auprès de qui elle a fait route et qui l’ont aidée à devenir elle-même…
Votre Excellence, Monsieur l’Ambassadeur, chers Amis, bonsoir !
Je ne vous cache pas combien grande a été ma surprise en apprenant cette nomination dans l’ordre du mérite national.
Spontanément, et sans fausse humilité, je me suis demandé pourquoi cette reconnaissance. Je comprends bien que les quatorze dernières années passées au Tchad au service des étudiants du CCU, Centre Catholique Universitaire, en sont la principale raison, mais je n’aurais pas pu vivre cette mission sans tous ceux qui ont contribué à faire de moi celle que je suis aujourd’hui.
Originaire de Bourgogne, fille de vigneron, j’ai ce soir une pensée particulière pour mes parents et ma famille.
En effet, elle constitue le terreau, le terroir, où j’ai puisé le sens du travail bien fait jusqu’au bout, une certaine détermination et ténacité et un certain art de vivre et de recevoir. Amitié, Hospitalité et Convivialité pourrait être notre devise familiale.
Après ma famille biologique, je voudrais évoquer cette profession d’institutrice dans l’Éducation Nationale.
Depuis l’enfance, j’ai toujours eu ce désir d’enseigner. J’aime aider à grandir, transmettre un savoir, éduquer, que ce soit avec des enfants, des adolescents ou des adultes. Et quand j’ai lu dans le Journal Officiel concernant ma nomination « 38 ans d’exercice », je me suis dit qu’effectivement, même si je ne suis pas restée 38 ans dans l’Éducation Nationale, je n’ai quasiment jamais cessé de travailler à la formation de ceux et celles auxquels j’ai été envoyée. Que ce soit comme institutrice en Saône et Loire, comme responsable pendant 8 ans des Aumôneries de l’Enseignement Public à Toulouse ou, durant ces 14 dernières années, avec les étudiants de toute filières, ethnies et religions accueillis au Centre Catholique Universitaire, il s’agit toujours de travailler à la formation intégrale des personnes, à leur croissance humaine et spirituelle.
Mais cette décoration, je ne l’aurais jamais reçue, car je ne serais de moi-même jamais venue au Tchad si je n’avais été envoyée par ma congrégation.
C’est pourquoi je veux aussi saluer ce soir les xavières qui depuis 40 ans ont œuvré auprès et avec cette population tchadienne qui nous est chère à tous ici présents. Que ce soit dans l’enseignement, la santé ou le développement, notre souci est toujours, avec nos collègues tchadiens et à travers nos engagements et propositions, d’aider les uns et les autres à aller de l’avant. Avancer dans l’apprentissage de la lecture et la socialisation par le jeu pour les enfants de l’association Bassima Sourire avec Sœur Marie-Hélène, prévenir et aider des personnes alcooliques ou victimes d’autres addictions à s’en libérer pour ceux qui frappent à la porte du CEDIRAA avec Sœur Aurélie, ou, pour moi et mon équipe au CCU, aider des jeunes à réussir leurs études en trouvant dans chacun des deux sites, Sabangali et Farcha, des espaces pour travailler au calme et des bibliothèques avec un fonds documentaire qui aujourd’hui dépasse les 10 000 livres universitaires, ce ne sont là que quelques facettes de nos missions actuelles.
Pour conclure, je rends grâce à Dieu pour sa présence à mes côtés et tous les liens tissés durant ces 14 années.
« Faire le lien avec tous, tel est notre désir profond », disent nos Constitutions. En ces temps troublés, où la violence et la terreur font la une de l’actualité, la diversité que nous représentons ce soir nous rappelle que la fraternité n’est pas un vain mot et qu’il y aura toujours de par le monde, des hommes et des femmes de bonne volonté, des croyants de diverses appartenances engagés au service de l’amitié entre les peuples et du vivre ensemble.
Merci à chacun et chacune de vous !
Brigitte Lécuelle, le 13 novembre 2023
